La gare de Wankdorf à Berne: un exemple pour une interface multimodale.

La multimodalité: le gymkhana de la mobilité

17.09.2024
9 | 2024

En 1929, Simone Louis de Pinet de Borde, une Française de 19 ans, obtient son permis de conduire. Un fait très rare à cette époque d’autant plus que cette dernière deviendra conductrice de rallye. C’est à elle que l’on doit cette fameuse expression entendue plus d’une fois avant un départ imminent: «En voiture Simone!». Un siècle plus tard, les trajets peuvent prendre bien d’autres formes: de la trottinette en libre-service au vélo cargo électrique avec les premiers kilomètres effectués en voiture individuelle, nos trajets peuvent constituer à eux seuls un véritable gymkhana aussi appelé multimodalité.

La multimodalité est la possibilité de relier deux lieux par divers modes de déplacements. Un déplacement dit «intermodal» signifie un déplacement au cours duquel le pendulaire change de moyen de transport. Les lieux de transition entre plusieurs modes de transport sont des interfaces de transport de voyageurs. Le bon fonctionnement de notre système de transport dépend de la facilité à pouvoir passer d’un moyen de transport à un autre. La planification et la réalisation des interfaces multimodales incombent aux cantons, aux communes et aux entreprises de transport. La Confédération peut apporter un soutien financier à ces infrastructures à travers le Programme en faveur du trafic d’agglomération.

La complexe cohabitation entre aménagement et mobilité

Chacune des 2148 communes suisses fait face à des défis en termes de mobilité qui vont de la «simple» gestion d’une route communale à la réflexion d’un plan de mobilité complexe gérant tant la politique de stationnement que de nouveaux outils pour favoriser un report modal de la voiture individuelle aux transports publics et à la mobilité douce. Les communes font face à des défis croissants pour faire cohabiter mobilité et aménagement du territoire. Cette complexité ne s’arrête pas aux frontières des plus grandes villes du pays, car près de 20% des trajets pendulaires trouvent leur origine en périphérie des agglomérations. Ces zones moins densément peuplées sont aussi moins bien desservies par les transports publics; par conséquent, les déplacements s'effectuent entièrement en voiture, alors même que les transports publics sont développés sur une grande partie du trajet. Le conseiller aux Etats Matthias Michel (ZG) met le doigt sur la cause: peu de possibilités de passer d’un moyen de transport à un autre.

Les possibilités de cofinancement d’infrastructures de la Confédération sont claires et significatives pour les communes géographiquement comprises dans les périmètres d’agglomération. Grâce à ce programme, la Confédération, à partir du moment où les communes se regroupent en structure d’agglomération, cofinance des mesures liées à des infrastructures de transport entre 30 et 45%.

Pour les communes en dehors du périmètre d’agglomération ou non organisées en structure d’agglomération un cofinancement est possible mais l’accès à ces fonds est plus complexe et la participation financière significativement moins importante. C’est spécifiquement ce raccordement en milieu rural qui est défaillant. L’ACS s’engage pour que toutes les communes qui le souhaitent et où un besoin est avéré puissent être soutenues dans un développement coordonné et efficient de l’urbanisation et des transports indépendamment de leur emplacement géographique. Cette position est portée par notre président le conseiller aux Etats Mathias Zopfi: «Ces infrastructures doivent être adaptées aux besoins tout en proposant des alternatives attractives au transport individuel motorisé, et ce également dans les régions rurales et périphériques.»

«Ces infrastructures doivent être adaptées aux besoins tout en proposant des alternatives attractives au transport individuel motorisé, et ce également dans les régions rurales et périphériques.»

Mathias Zopfi, conseiller aux Etats, président de l’ACS

De la Déclaration d’Emmenbrücke de 2021 au 16 août 2024

En septembre 2021, la Confédération, les cantons et les communes suisses ont signé la Déclaration d’Emmenbrücke afin de sceller politiquement leur collaboration en matière de multimodalité. Cette étape a officiellement lancé un programme pluriannuel. Trois ans plus tard, les mêmes acteurs se réunissent à nouveau pour tirer un bilan de ce programme. Le conseiller fédéral Albert Rösti le juge positif car il contribue à renforcer le trait d’union entre zones rurales et zones urbaines: «Avec le programme pour les interfaces multimodales, nous avons fait un grand pas en avant pour rendre notre système de transport encore plus efficace et plus résistant. Il faut maintenant passer à la mise en œuvre dans les cantons, les communes et les villes, et j’ai bon espoir que ce travail se poursuivra avec le même engagement qu’auparavant.»

«Avec le programme pour les interfaces multimodales, nous avons fait un grand pas en avant pour rendre notre système de transport encore plus efficace et plus résistant.»

Albert Rösti, conseiller fédéral

«Le roi est mort, vive le roi»

C’est par ce proverbe que Ulrich Seewer, sous-directeur de l’Office fédéral du développement territorial (ARE), illustre la fin du programme pour les interfaces multimodales. Car, même si ce programme prend officiellement fin lors de la manifestation du 16 août, la multimodalité continuera à se développer. Ces interfaces font déjà partie intégrante de tous les programmes d’agglomération: la preuve que ce concept est déjà bien en route. Pour l’ACS, l’objectif est clair: permettre à toutes les personnes qui le souhaitent de pouvoir changer facilement de moyen de transport et cela aussi dans les régions périphériques.

Save the date: 29 octobre 2024, Genève

En octobre prochain, experts, communes, cantons et représentants de la branche des transports se retrouveront à Genève. Après une première édition zurichoise à succès en mars dernier, le réseau «interfaces multimodales» dont l’Association des Communes Suisses est partenaire pose ses valises en Suisse romande.

En attendant, un guide publié par l’Union des transports publics (UTP) à l’attention des acteurs locaux est disponible. Ce guide complet et illustré par des vidéos permet aux communes de mieux appréhender la thématique de la multimodalité.

Manon Röthlisberger
Association des Communes Suisses
Vice-directrice