Bulle: une gare se transforme en «hub de vie»
Un quartier de gare réaménagé devient un nouveau centre de gravité de Bulle. Un exemple de développement coordonné du réseau de chemins selon le guide «Interfaces de transports» de l’Union des transports publics.
L’agglomération de Bulle (FR) a connu pendant des décennies une forte croissance économique et démographique, l’une des plus élevées de Suisse. Un tel «boom» est un défi pour les espaces et infrastructures publiques, y compris pour les infrastructures ferroviaires. Ainsi, au début des années 2010, les Transports publics fribourgeois (TPF), en tant que gestionnaire de l’infrastructure de la gare, ont constaté que la gare, agrandie 20 ans plus tôt, atteindrait bientôt ses limites de capacité. A cela s’ajoutait le fait que certains trajets de correspondance étaient longs et peu accueillants. De plus, la situation en courbe de la gare empêchait de répondre aux exigences de la loi sur l’égalité des personnes handicapées (LHand).
Compte tenu de l’exiguïté du plateau de la gare et des exigences accrues en matière d’infrastructure ferroviaire et de réseaux de chemins, les TPF ont proposé de déplacer la gare de plusieurs centaines de mètres vers l’ouest: avec des répercussions importantes sur le développement et la vie de la ville, dont le centre de gravité se déplacerait (illustration 1).
Tous les acteurs se sont coordonnés
L’exemple montre que les intentions de certains acteurs concernant les modifications spatiales dans et autour des gares ou interfaces de transports, aussi sans le ferroviaire, concernent généralement aussi d’autres acteurs – et la population locale. Cela ne vaut pas seulement pour les aménagements à relativement grande échelle comme à Bulle, mais en fin de compte pour toutes les adaptations, même à petite échelle, dans et autour des interfaces de transports. Compte tenu du fait qu’en Suisse, aucun acteur n’assume la responsabilité globale d’une interface de transports donnée en tant que système spatial, il appartient à tous les acteurs d’assumer leur coresponsabilité et d’être prêts à collaborer.
C’est ce qui s’est fait à Bulle: les TPF se sont coordonnés avec la ville et d’autres acteurs locaux, principalement des propriétaires fonciers. Ensemble, ils ont formulé des exigences concernant les offres prévues, l’intégration de la nouvelle interface de transports dans le milieu bâti existant et planifié, ainsi que l’accessibilité de tous les moyens de transport depuis toutes les directions. Un accent particulier a été mis sur la circulation des piétons et des cyclistes dans le quartier de la gare – car sans desserte adaptée, il n’y a pas d’usagers.
Ensemble, les acteurs locaux ont initié une étude parallèle (MEP) pour les environs de la gare afin de déterminer les attentes de la population tout en coordonnant leurs intérêts particuliers et communs autour du nouveau quartier de la gare. L’utilisation multifonctionnelle de certaines surfaces et de certains espaces a permis une mise en réseau des différentes offres adaptée aux besoins et conviviale pour les usagers.
Une interface de transports sur deux niveaux
Le résultat (provisoire) est une interface de transports sur deux niveaux, reliée à un large passage souterrain pour former un ensemble cohérent. Elle permet aux usagers d'accéder aussi bien aux quais qu’aux voies piétonnes et cyclables, rend la gare perméable et dirige les usagers directement vers la place de la gare.
L’illustration 2 donne une vue plongeante sur la nouvelle place de la gare depuis la piste cyclable (niveau des quais): un lieu public de séjour, d’échange et de rencontre avec différentes offres commerciales et de mobilité. Des arrêts de bus urbains, une station de vélos avec accès à la piste cyclable, des taxis et des véhicules partagés ainsi qu’un hôtel, un café-restaurant et plusieurs magasins sont situés à proximité. Un sous-sol offre des possibilités de stationnement public et privé. Les acteurs ont su transformer la gare en véritable «hub de vie»
La démarche de Bulle illustre un principe pour les activités des acteurs, auquel le guide de planification «Interfaces de transports» accorde une importance décisive: planifier de manière ciblée, coordonnée et continue les offres et les réseaux de chemins pour les personnes et les flux de personnes tout en gardant en vue toutes les fonctions.
L’illustration 3 montre schématiquement comment les acteurs peuvent visualiser ensemble des variantes de localisation des offres. En effet, les emplacements des offres (visualisés par des icônes avec la surface nécessaire) influencent le réseau piéton: aussi bien les trajets entre les offres de mobilité (en rouge) que les accès depuis la zone d’habitation (en bleu). D’autres visualisations à recommander pour les discussions sur les variantes sont les illustrations du point de vue des utilisateurs – en utilisant p. ex. la Customer Journey.
Cette démarche peut s’appliquer à tous les horizons temporels: de l’état initial jusqu’à l’état cible, en passant par les phases de construction et les étapes de réalisation. Elle favorise et exige une coordination continue et plus encore: elle vise une cocréation qui prenne en compte toutes les fonctions, les intérêts et attentes, d’anticiper les changements et de trouver des solutions appropriées et durables. Pour que les gares se transforment en interfaces de transports et hubs de vie.
Ce sont précisément les thèmes centraux du guide de planification «Interfaces de transports» de l’Union des transports publics: il explique des bases, des approches et des méthodes qui ont fait leurs preuves dans la pratique (tome 1) et les illustre par des exemples (tome 2).